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"Seul la longueur et la dureté de l’aventure permettent de se retrouver avec soi-même, de réaliser un voyage intérieur au plus profond de son corps et de découvrir des ressources morales et physiques jusqu'alors insoupçonnées. Le corps humain est une machine tantôt surprenante tantôt merveilleuse avec une capacité d’adaptation hors du commun"

UTMB 2016 – Récit

Voici le compte rendu de mon UTMB 2016, arrêté bien trop tôt malheureusement…Malgré cela, venez découvrir ma mésaventure qui me servira pour la suite de mes défis… Ma saison est d’ores et déjà bien remplie, avec beaucoup d’émotions et énormément de satisfactions sportives et humaines, par contre, je me voyais avec plein de motivation pour réaliser une belle course lors de cet UTMB 2016. Après une semaine pré-course un peu mouvementée avec un enterrement de vie de garçon à Varsovie et deux jours de travail bien chargés avant d’arriver à Chamonix, j’aborde ces derniers jours très positivement. Entre le morning run avec mon partenaire Compressport et la signature de poster, je profite de l’ambiance et de l’engouement dans les rues de Chamonix! De super moments d’échanges et de rigolades. 14067837_1266048493428652_8459285178486654650_o 14115479_1266051316761703_8850094869373249953_o J’aborde le vendredi 26 août, sereinement. Les résultats de l’IRM de mon pied droit passé le mardi avant la course ne révèlent aucune fracture, par conséquent, je serais bel et bien au départ vendredi à 18h. La préparation se déroule comme d’habitude, je sens la tension et l’envie monter mais je ne me sens pas stressé pour autant, je me réjouis vraiment !14117863_10157298250910621_8859876802974625703_n J’ai reçu mes chaussures uniquement mardi, 4 jours avant la course, je n’ai donc pas pu les tester, je connais le modèle parfaitement puisqu’il m’a accompagné lors de tous mes ultras depuis 2012 ! Je vais faire un petit footing mercredi matin avec ces chaussures, je ne vois pas de différences et je décide donc de partir avec. Ce choix vise à privilégier la protection de mon métatarse du pied droit des pierres en utilisant une paire de chaussure dont la semelle n’est pas encore tassée. Normalement, j’aurais voulu les tester sur quelques sorties plus longues avant la course mais je n’ai pas eu cette chance. Sur la ligne de départ, 2300 fous furieux se sont réunis, je me trouve au niveau de la 3ème ligne, derrière Luis Alberto Hernando, le grand favori, et à côté de Gediminas Grinius ou Ludo Pommeret. Il est 17h40 et l’ambiance monte peu à peu sous les poussées et les cris de Ludo Collet, magistral comme à son habitude ! 17h57, la musique de Vangelis, cette musique pénétrante entre en scène, la chair de poule, je profite de ce moment en fermant les yeux comme pour absorber l’énergie et l’électricité ambiante, ces moments me transcendent et j’adore les vivre ! 30sec….départ !!! La meute est lancée et plutôt rapidement comme à son habitude ! Je me retrouve assez vite dans un groupe avec Séb Camus, Luis Alberto, Miguel Heras et Stephan Hugenschmidt. Un groupe de 7 ou 8 coureurs sont devant nous. Nous courrons à 15 ou 16km/h jusqu’aux Houches. Je sens que mes jambes sont un peu lourdes, la chaleur et la lourdeur ambiante n’aidant pas à se sentir léger mais les sensations ne sont pas catastrophiques non plus et la course ne fait que commencer, à vrai dire elle n’a pas encore débuté. Passage aux Houches sous un bain de foule et montée sur le Délevret, je monte à mon rythme et gardant en point de mire certains coureurs. Je bascule en haut avec Gemidinas Grinius et avec Arnaud Lejeune juste devant ! Départ_UTMB Je m’élance dans la descente et je reprends très vite les coureurs devant, puis je sens que mes pieds brûlent, ils surchauffent, je décide de freiner mais ça ne va pas vraiment mieux, je sens ma peau frotter dans la chaussures et je sens d’ores et déjà l’arrivée de cloques…Je suis décontenancé, je ne sais pas quoi faire, au prochain ravitaillement à St Gervais, je ne peux rien changer et je me dis que je vais regarder s’il y n’y a pas quelques petits cailloux qui se seraient glisser dans les chaussures. J’arrive environ en 10ème position ! Je cherche Maya du regard pour lui signifier mes problèmes et qu’il faut changer qqch aux Contamines. J’enlève mes chaussures et….pas de cailloux mais déjà une grosse gêne au talon avec une cloque d’ores et déjà présente. Je suis un peu déconcerté et des questions fusent dans ma tête. Déjà ? Pourquoi ? et surtout comment résoudre ce problème… ? Je me reprends et me relance à l’assaut des contamines, j’espère de tout cœur que les cloques ne sont pas à un stade trop avancé. Dans cette partie plutôt vallonnée, les douleurs sont supp ortables car il n’y a pas de grosses descentes, je suis avec Stefan Hugenschmidt et un espagnol que je ne connais pas, Arnaud Lejeune est juste devant nous ! Je me trouve exactement où je voulais à ce stade de la course, pas loin de la tête mais légèrement en retrait pour faire ma course et garder quelques forces ! On allume les frontales peu avant d’arriver au ravitaillement des Contamines, mes cloques me gênent fortement dans la dernière petite descente avant de remonter pour le ravito ! En arrivant à ce ravito, j’entends les encouragements mais je suis KO comme si je venais de prendre un crochet du droit, non pas que je suis fatigué mais je ne trouve pas de solutions… Ma moitié me prend en main, décidée, déterminée comme d’habitude, son énergie m’inspire, me relance, me rebooste….mais que faire ? Après quelques minutes de discussion et après avoir contemplé mes cloques, elle paraît tout aussi décontenancée ! Tu te prépares pendant des mois, tu envisages pleins de solutions mais tu ne penses pas à des douleurs si handicapantes surtout à partir du 15ème km ! On demande l’avis du staff médical qui nous conseille de percer les cloques pour éviter qu’elles ne grandissent trop ! Je change également de chaussures et de chaussettes mais comme le mal est fait, ça n’a plus trop d’influence ! Nous nous regardons avec Maya, yeux dans le yeux, elle comprend que ce sera très difficile, je repars après 15min d’arrêt aux contamines, devant le train est parti mais la course est longue, très longue….seul problème, généralement les cloques surtout à cet endroit et de cette taille ne se résorbent pas si facilement donc les chances que ça tourne sont très faibles ! La relance est compliquée, je pars derrière David Laney mais je me sens faible ! Avec toutes ces histoires, je ne me suis pas vraiment ravitaillé comme je l’aurais voulu ! J’ai perdu le fil de ma course ! Je fais le vide, je tente de faire abstraction de ces douleurs qui me gênent également en montée, en fait dès que le talon touche le sol. A Notre Dame de la Gorge, mon regard est vide, je cogite, je doute, j’essaie de tout faire pour rester dans ma course ! A la Balme, c’est difficile, le col du Bonhomme et la croix du Bonhomme, je les passe tant bien que mal, comme si mes cuisses n’acceptaient plus le défi! Je me parle… « Allez reste positif, pense à aller aux Chapieux » je me dis que je rentre dans une « autre » course, une aventure à un autre rythme que celui que j’aurais souhaité, je me conditionne mentalement à vivre d’autres émotions. La descente vers les Chapieux est probablement la descente la plus lente de ma jeune carrière de traileur ! Je ne peux jamais laisser aller, je dois me retenir, chaque changement de direction est très douloureux et j’ai l’impression de me décrocher le talon ! Mon corps se met en mode survie et ne me laisse plus aller chercher au-delà de la douleur, je suis donc en mode tortue ! Mon plaisir, mon sugus, c’est-à-dire les descentes ne sont plus au rendez-vous !14192010_10157326346990621_5405840913064206290_n J’arrive aux Chapieux après m’être fait passer par Sangé Sherpa toujours aussi sympathique et Guillaume Porche avec qui j’avais fini au Trail de la Galinette ! Deux super types qui me remonte le moral et avec qui j’échange deux trois phrases mais je ne veux pas qu’ils s’attardent, ils sont dans leur course et ils doivent en profiter ! Le trail c’est ça aussi, des échanges, des petits de moments de partage et de la solidarité ! En arrivant aux Chapieux, j’entends Caroline arriver derrière, je l’encourage, elle s’étonne de me voir là et elle repart devant, à son affaire ! Je tente de m’alimenter, l’aventure de nuit risque d’être longue jusqu’à Courmayeur… En repartant sur les 5km de faux plats montant jusqu’au pied du col de la Seigne, je peux courir, dans ces parties mon talon me gêne beaucoup moins, je reprends un bon rythme et je rattrape puis lâche Didrik Hermansen qui est également en grosse difficulté, je reviens sur Guillaume Porche puis Caroline Chaverot qui était repartie 3-4 minutes avant moi des Chapieux ! Dès les premiers contreforts du col de la Seigne, les douleurs m’empêchent de marcher normalement et mon énergie diminue, je m’éteins peu à peu et reprends un rythme de tortue avant de sombrer sur le haut du col de la Seigne… Ludo Pommeret me reprend et bien d’autres coureurs qui me reconnaissent et m’encouragent, ça me touche ! Ludo me dit qu’il se sent mieux et que ça a tourné pour lui, il revient à l’assaut de la tête de course. Il reviendra d’ailleurs comme un avion pour remporter une des plus belles éditions en terme de suspense, bravo à ce monstre, ce champion hors norme ! La petite descente du col de la Seigne avant d’aborder le col des Pyramides calcaires est un long chemin de croix, je dois marcher voire même m’arrêter surtout quand c’est raide ! et ce col, ouf.. difficile, je dois m’asseoir au milieu, je regarde le ciel, cherche mon étoile, un deuxième souffle, de nouveaux pieds ;-) Au sommet Didrik et Andrea Huser reviennent sur moi, je tente de m’accrocher, Andrea s’en va dans la descente et Didrik tombe, je l’aide à se relever, nous discutons, on ira jusqu’à Courmayeur si possible ensemble pour se donner de l’énergie pour si l’un de nous à un souci et après on verra ! En arrivant au Lac Combal, on reprend Tom Lorblanchet, même constat il marche, pas dans un bon jour ! De mon côté ce manque d’énergie ne me dérange pas spécialement car je sais que dans un ultra les hauts et les bas sont nombreux, ce qui me dérange c’est cette incapacité à me laisser aller en descente et à pousser en montée, je suis comme une voiture bridée ;-) Nous repartons à 3 du lac Combal et j’en oublie même mes bâtons, je reviens les chercher et tente progressivement de recoller au wagon Didrik-Tom. Dans l’arrête Mont-Favre je recolle et mène le rythme, la montée se passe un peu mieux que les précédentes mais les cuisses accusent le coup puisque je fais toutes les descentes sur la pointe des pieds et sur les cuisses pour éviter de solliciter mes talons. Après la longue partie de relance qui s’ensuit sur laquelle nous reprenons Andrea, la descente sur Courmayeur arrive ! Environ 40min de grimaces et de rando course pour rallier Courmayeur et revoir mon incroyable équipe de choc…mais que faire, quelles sont mes possibilités ??? Il s’ensuit une longue discussion avec Maya, continuer et randonner dans les descentes ne me fait pas peur mais qu’en est-il de mes pieds ? Je ne veux pas aggraver la situation en pensant aux prochaines échéances, je vais donc trouver le podologue pour qu’il me fasse des soins et qu’il me donne son avis. Après 30mn de soin et de bonne humeur, il me conseille d’en rester là si je ne veux pas compromettre la fin de saison, mon pied droit est atteint au niveau de l’épiderme tandis que le gauche est déjà au niveau du derme et risque de s’agrandir. Je prends le chemin de la sagesse, pour une fois….chemin que je ne prendrais pas toujours mais qui compte tenu des circonstances était la bonne décision à prendre ! Je suis déçu, très frustré avec le sentiment de ne pas avoir pu m’exprimer comme si je me réveillais d’un cauchemar ! Quels sont les enseignements à en tirer ? Que s’est-il passer ? Ce type de questions viendront dans un 2ème papier… En attendant, je suis également triste pour ceux qui me suivait et ceux qui voulait me rejoindre le samedi, ce sont les risques de l’Ultra et je remettrais ça que ça soit sur l’UTMB ou sur une autre belle course ! Après quelques jours, ma motivation est encore plus grande et je sais que d’autres satisfactions suivront mais également que ce ne sera pas la dernière déception car le sport est ainsi fait ! Je vais remettre l’ouvrage sur le métier, les échecs ont tendance à nous recentrer et nous permettent de valoriser d’autant plus les bons moments. A bientôt ;-) Et n’oubliez pas de profiter de chaque instant avec ceux que vous aimez ! 14100402_1266052293428272_4414973263146301730_n #trailyourlife #smileyourlife

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DIego Pazos

Tombé dans la marmite du Trail et de l'Ultra Trail en 2012. Je parcours les crêtes et les sommets à la recherche d'aventure, de découvertes et d'émotions.

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